jeudi 23 mai 2013

"Chut, c'est un secret" dit le pâtissier Pierrot B.

Bonjour, comment allez-vous ?  
Il était une fois mon père. Il était gourmand.
Il était une fois le copain de mon père. Il était pâtissier. 
Il s'appelait Pierrot.... Pierrot Bonnet.  Je n'ai rien inventé. Aucune erreur. C'était bien là son vrai nom. Un nom approprié pour être boulanger-pâtissier, vous en conviendrez. Et de fait, dans mon souvenir, je ne revois Pierrot Bonnet que chapeauté de ce haut bonnet blanc et plissé.

Donc mon père était gourmand et son copain Pierrot  pâtissier. Une parfaite association amicale. L'un grand et mince. L'autre petit et plutôt arrondi. Comme une belle aubaine.

Pour l'un comme pour l'autre. Et aussi pour ma mère.
Je n'oublierai pas cette dernière, debout devant la table et face à mon père, assis devant un, deux, trois plein plateaux de choux à la crème pâtissière. Mon père adorait la crème pâtissière. Elle avait l'air aussi admirative que dégoûtée. Et aujourd'hui je ne sais pas pourquoi viennent à mon esprit les noms de Gnathon, ou Gargamelle et les truculences de l'époux de cette dernière. 
Le Tarn et Garonne était le département de naissance de mon père. Une ferme, son lieu de naissance. Un pigeonnier sur quatre pilotis, la caractéristique du lieu. Ferme et pigeonnier, bâtis sur une "serre", 
particularité géographique des environs de Lauzerte.  
Mon père était un gourmand. Il adorait les choux à la crème pâtissière. C'est son ami Pierrot, qui pâtissait des macarons sans pareils, qui lui amenait parfois, le dimanche, un deux trois plateaux de choux. Comme aujourd'hui vous pourriez acheter dans ce même département les fruits aux plateaux, mon père mangeait les choux par plateau. Et alors... 
Alors ces dimanches-là, nous attendions la fin du repas plus vivement que d'ordinaire. Et alors ? 
Alors mon père devenait un héros. Les voisins et voisines venaient assister à l'événement. L'expression "Combien en avalera-t-il cette fois ?" était sur toutes les lèvres.
Sous les yeux, les leurs, les nôtres, mon père avalait les choux l'un après l'autre. Venait toujours l'instant où ma mère intervenait d'un "Henriiiiiiiiiii !" du style "voyons, arrête, tu vas te rendre malade !" C'est après demain la fête des mères. Ma mère était une mère pour mon père. Il riait. Et quand enfin il s'arrêtait, Pierrot était interrogé : "Alors, il y en avait combien en tout !" Pierrot répondait en riant "Sûrement un de plus au moins !"
Aujourd'hui je me demande si cela se passait certains dimanches et pourquoi ? Ou si je n'ai pas monté en Chantilly chacun des anniversaires paternels.
Mon père était un gourmand. Il aimait aussi la Chantilly.
Il aimait, les choux à la crème, la chantilly et faire chabro aussi. Mais rien à voir avec un dessert. Poursuivons dans les desserts. Il y eut aussi dans mon enfance une drôle de nuit. (le texte n'est pas fini)
La nuit du gâteau .
Et avant cette nuit-là, tous les sous-entendus, tous les chuchotis, toutes les conversations interrompues et les doigts sur les lèvres qui nous interdisaient toute interrogation à propos du secret. Evident. Un secret est un secret. Alors, nous, mon frère et mes soeurs, nous attendions. A l'affût des "Vous la verrez, une nuit, rien que pour votre père, un cadeau, il l'adore, votre grand-mère la lui faisait, pour lui tout seul, et Pierrot a reçu la recette de sa main...." La nuit est venue. Le plateau, porté avec mille égards et précautions par l'ami Pierrot, fut déposé de même, sur la table. Et le torchon à carreaux rouges, une fois soulevé d'un geste quasi divin, Elle est apparue, comme aurait dit patrick Abrial "éblouissante et nue" heu pardon, éblouissante et poudrée et bellement pommée, parfum manzana, la tarte d'Henri. Une légende, qui se poursuit encore aujourd'hui.

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