jeudi 12 avril 2007

La figue et le paresseux - 4 ème partie

bravo vous avez trouvé

... le père prit un parti.

- "Ecoute", dit-il à son fils, "puisque tu veux être paresseux à toute force, je vais te conduire chez Lakdar, il te passera un examen, et si tu as réellement les dispositions pour son métier, je le prierai de te garder chez lui, en apprentissage"
- "Ceci me va", répondit l'enfant.

Et, pas plus tard que le lendemain, ils s'en allèrent tous les deux, parfumés de verveine et la tête rasée de frais, trouver le paresseux dans son petit jardin.

La porte était toujours ouverte. Nos gens entrèrent sans frapper, mais, comme l'herbe montait très touffue et très haute, ils eurent quelque peine à découvrir le maïtre du clos. Ils finirent pourtant par apercevoir, couché sous les figuiers du fond, dans un tourbillon de petits oiseaux et de plantes folles, un paquet de guenilles jaunes qui les accueillit d'un grognement.

- "Le Seigneur soit avec toi, Sidi Lakdar," dit le père en s'inclinant. "Voici mon fils qui veut absolument se faire paresseux. Je te l'amène pour que tu l'examines, et que tu voies s'il a la vocation. Dans ce cas, je te prie de le prendre chez toi comme apprenti. Je paierai ce qu'il faudra"

Sidi Lakdar, sans répondre, leur fit signe de s'asseoir près de lui, dans l'herbe. Le père s'assit, l'enfant se coucha, ce qui était déjà un fort bon signe. Puis tous les trois se regardèrent sans parler.

C'était le plein midi du jour. Il faisait une chaleur, une lumière !... tout le petit clos avait l'air de dormir ; on n'entendait que le crépitement des genêts sauvages crevant leurs cosses au soleil, les sources chantant sous l'herbe et les oiseaux alourdis qui voletaient entre les feuilles avec un bruit d'éventail ouvert et refermé. De temps en temps, une figue trop mûre se détachait et dégringolait de branche en branche. Alors, Sidi Lakdar tendait la main, et, d'un air fatigué, portait le fruit jusqu'à sa bouche. L'enfant, lui, ne prenait pas même cette peine. Les plus belles figues tombaient à ses côtés sans qu'il tournât seulement la tête. Le maître, du coin de l'oeil, observait cette magnifique indolence ; mais il continuait à ne souffler mot.

Une heure, deux heures se passèrent ainsi... Pensez que le pauvre tourneur de tuyaux de pipe commençait à trouver la séance un peu longue. Pourtant il n'osait rien dire, et demeurait là, immobile, les yeux fixes, les jambes croisées, envahi lui-même par l'atmosphère de paresse qui flottait dans la chaleur du clos avec une vague odeur de banane et d'oranges cuites.

Tout à coup...

... à suivre.

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