dimanche 20 novembre 2016

Conte russe d'automne "Le Grand Cèpe Tinepou"

Au pays des champignons, le grand Cèpe TINEPOU



Histoire Russe. 
Histoire du temps où le tsar Petit-Pois -que ma mère Anastasia connut fort bien- faisait la guerre aux champignons. 
Il était une fois, le Tsar Petit Pois. Qui ne cessait de déclarer la guerre aux champignons. L'un d'eux  attrapa le virus. C'était celui  qui habitait dans la grande forêt et très exactement sous le plus grand chêne en portant haut chapeau sur pied. 

Un matin, ainsi que Petit-Pois son mentor, il se lève à son tour, l'humeur exigeante, belliqueuse et colérique. Pour partir en campagne autant s'inquiéter du temps qu'il fait. Il regarde la couleur du ciel : il est d'un bleu merveilleux. C'est top bon. 
Une deux, une deux, allure martiale le Grand Cèpe Tinepou, c'est son nom, s'avance.
Une deux une deux, allure martiale le Grand Cèpe Tinepou, baisse le regard : 
c'est la chance du jour. Il va pouvoir faire la guerre. Une batterie de  Nonettes de la branche Bolets toutes habillées d'un beau vêtement jaune l'attend au bas d'un pin à deux aiguilles. 
En Provence on les appelle picassan ie pisse-de-chien, pourtant elles sont comestibles



Le goût pour la guerre le prend, l'audace l'emporte, il passe à l'attaque
"Nonettes déclarez-moi la guerre !"

La guerre ! Quel vilain mot. Les demoiselles sont offusquées cependant,  elles ne perdent pas le Nord. Elles répondent élégantes et droites dressées 
 "Heu, quoi, la guerre, mais de quelle guerre parlez-vous, 
le jour se lève et vous partez déjà en guerre Grand Cèpe Tinepou ? 
Avez-vous oublié qui nous sommes ? Nous sommes les Demoiselles Champignonnières, il n'est pas question que nous vous fassions la guerre ; ce que nous aimons nous, c'est ne pas la faire, ce que nous aimons nous, c'est être en Paix"
Puis les Nonettes, l'ignorant, reprennent leurs conversations du matin.




Dépité,  Grand Cèpe Tinepou fit un quart de tour et d'un tour d'horizon il salue sa chance. Face à lui, se tiennent, en rond, des membres de la famille Palomets, 
Ils appartiennent à la branche Russule.   
Les individus sont vêtus d'un chapeau verdoyant. Du claquement sec de ses deux bottes qui se resserrent  pour mieux le tenir debout, le goût pour la guerre reprend le Grand Cèpe Tinepou, l'audace l'emporte, il passe à l'attaque et d'une voix de stentor il ordonne le commandement suivant 
"Palomets Verdoyants déclarez-moi la guerre !"

C'était encore le matin, les Palomets Verdoyants  venaient à peine d'ouvrir leurs lamelles. Ils n'en perdirent pas le Nord pour autant. Ils répondirent avec fermeté : 

"Qu'avons-nous entendu ? Qu'avez-vous crié ? Ne  voyez -vous pas  Grand Cèpe Tinepou que nous sommes de riches propriétaires terriens. Nous sommes en réunion parce que nous avons beaucoup d'affaires en cours, 
nous n'avons aucune raison de vous faire la guerre ! 
Et encore moins de perdre du temps !" 
Ils se turent et tournèrent le dos au Grand Cèpe Tinepou


Pris de colère celui-ci exécuta un second quart de tour. Et cette fois il fit face à une jolie  bande de Coulemelles



Elles tombaient bien celles-là, avec leur chapeau blanc gris rond et légèrement frisé et vêtu de leur longue robe bustier blanche. Il n'hésita pas. Il passe à l'attaque ; il les interpelle froidement 


"Coulemelles, déclarez-moi la guerre !" 


Les Coulemelles sont des travailleuses courageuses et acharnées : elles revenaient du marché au pas cadencé. il n'était pas question pour elles d'arriver en retard aux cuisines du châtelain.  Elles se sont arrêtées et lui ont tenu tête de cette vaillante réponse : 

"Que nous dites-vous Sieur Tinepou Cep, 
vous voulez que nous vous fassions la guerre ? 
Vous n'y pensez pas, quelle idée ! 
Ne savez-vous donc pas qui nous sommes ? 
Nous sommes les cuisinières du château. 
Nous n'avons pas envie de faire 
la guerre et si nous en faisions une ce serait uniquement 
celle contre nos fourneaux ! 
Ils ne sont pas devant nous" 
Et, la tête fière, pan pan pan pan elles poursuivirent leur chemin au pas cadencé. 



Dans un mouvement qu'il fit à ce moment-là, sous l'effet d'une forte mauvaise humeur,  le Grand Cèpe Tinepou remarqua les demoiselles Chanterelles. En nappes, elles recouvraient le sol et parfois étaient recouvertes de brindilles. Se cacheraient-elles ? Certaines aiguilles au-dessus d'elles bougeaient. Tout simplement parce que les Chanterelles entretenaient leur forme. Elles penchaient leur tête sur l'épaule, à droite, une fois  ;  "ne tirez pas sur vos cervicales, ne relevez pas vos épaules"  aurait dit leur coach Quentin leur coach : il ltenait à leur enseigner le bon mouvement. et toujours sur un rythme régulier sans oublier de respirer*



Les bottes se rapprochèrent pour claquer violemment. Les Chanterelles sursautèrent. Le timbre haut et fort,Grand Cèpe Tinepou leur enjoignit à leur tour le même ordre qu'il avait enjoint aux Nonettes, aux Palomets Verdoyants et aux chapeautées Coulemelles 

"Chanterelles faites moi la guerre !... 
C'est un ordre !" 

Les Chanterelles étaient outrées 

"Comment donc vous faire la guerre ? Ne voyez-vous pas notre taille altière ! 
Nous n'allons pas risquer la perdre en vous faisant la guerre Grand Cèpe Tinepou ! 
La guerre n'est pas de notre ressort. Nous ferions piètre figure. 
Vous vous y ennuieriez ! Sachez Grand Cèpe Tinepou que la guerre ne nous intéresse pas, Nous lui préférons la paix. 
Laissez-nous nous entraîner pour la prochaine marche de la Paix !"  
Et, comme si de rien n'était, elles se remirent  à pencher à droite, à pencher à gauche, regarde-ci regarde-là, et à enchaîner les uns après les autres quelques steps, quelques chaises, quelques étirements propices à l'entretien de leur forme. 

Le Sieur Tinepou Cep ne savait plus où donner du chapeau, quand son regard s'arrêta sur un tapis de Mousserons au demeurant forts mignonnets ! 



Au bas mots, serrés les uns contre les autres, ils étaient plus d'un millier. La chance. Grand Cèpe Tinepou n'hésita pas, il hurla 

"Mousserons déclarez-moi la guerre !... 
C'est un ordre !"

Les Mousserons, groupés par millions, n'attendaient que ça : ils éclatèrent de rire puis se dépêchèrent de le rassurer :  

"Avec plaisir, nous n'attendions que ça 
nous sommes une belle troupe guerrière 
et nous ne cherchons qu'à nous battre. 
Soldats, allons-y ! Au combat !" 

Qu'advint-il du Grand Cèpe Tinepou ?  L'histoire ne le dit pas. Elle dit simplement qu'elle s'est produite au temps où le tsar Petit-Pois faisait la guerre aux champignons. L'histoire est-elle seulement bien finie. La souris l'a dit.

A bientôt cher lecteur, chère lectrice.



* me rappelle un souvenir de Corse. J'habitais une belle maison 
au-dessus de Porticcio. Dans le maquis Côôôôrse et je croyais 
que c'était la dernière maison. Sur la plage un jour j'ai rencontré 
une jeune femme. Et mon Guillaume, sa petite fille Stéphanie. 
Nous avons fait connaissance. Je découvris qu'elle habitait 
bien au-dessus encore de chez moi. La dernière maison du maquis. 
Nous avons pris l'habitude et le plaisir de nous retrouver sur la plage.  
Un jour elle m'invite. je monte, je monte, je monte une route cabossée 
et terriblement ravinée par les pluies abondantes passées. 
Ma belle R16 se tire bien des tracas, quand soudain, regard sur la gauche, 
sous les buissons un tapis d'or attire mon attention. Une vraie trouée de soleil. 
Elle me happe tant que je m'arrête,  je descends, et je cueille, je cueille, 
je cueille, gentiment aidée par mon fils qui à deux ans et demi a appris  
pour de vrai, ce que c'était que les girolles -aussi appelées chanterelles- 
et les trompettes de la mort. Avec ma nouvelle amie qui avait des pots 
nous avons mis en conserve, mis en conserve et encore et encore 
mis en conserve. Un vrai pactole. Réjouissante journée. 
Réjouissante #Corse.

PS une photo est empruntée à

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