IL ETAIT UNE FOIS en Russie, par de-là taïga, par de-là toundra, par de-là 7ème forêt du 7ème royaume, petite isba et Vieux Vieux Vania et Vielle Vieille Olga qui l’habitent depuis leurs vingt ans. Ces deux-là étaient riches d’un amour fou. Bien que pauvres ils ne s’étaient jamais séparés.
Un jour ils devinrent si pauvres qu’ils n’eurent plus rien à se mettre sous la dent.
“Vania mon amour” dit Vieille Vieille Olga qui parfois s’appelle Lania “cours auprès du grand Chêne et ramène-nous une besace de glands à ras-bords pleine”
Vous savez comment on fait dans les contes
on raccourcit. Épargnés chemins épargnées embûches.
Vieux Vieux Vania est de retour et bientôt Vieille Vielle Olga présente sa purée de glands au bon beurre salé Bordier (oui elle en avait) et tous deux se régalent. Ils s’en régalent un jour ; ils s’en régalent deux jours ;
mais au troisième jour plus de régalade, il n’y a plus de glands.
Enfin si, il n’y en a qu’un, un seul et quand ils veulent l’attraper pour se le partager le gland tombe et se coince dans une fissure. Impossible de le retrouver. Tristesse dans l’isba. Froide nuit ? Non, ces deux-là savent se tenir devant les épreuves.
Mais le lendemain matin comme tous les matins, Vieille Vieille Olga se lève et nettoie sa petite isba. Peu après son Vieux Vania d’amour vient
Vania Vania regarde-moi ça
Vania veut bien regarder mais il faudrait déjà qu’il ouvre les yeux. Pendant qu’il se frotte les paupières, expliquons :
le gland, dans la fissure, il a germé, et le germe il a tant poussé qu’il est devenu tige
la tige a tant poussé qu’elle a donné des feuilles et qu’elle est devenue tronc et que le tronc, c’est magique, il est en train de pousse pousser tant pousser qu’il va toucher le plafond
Et Vieille Olga d’amour répète,
« Regarde Vania d’amour, le tronc va toucher le plafond vite Vieux Vania aide le chêne, fais un trou dans le plafond” et Vieille Vieille Olga d’amour rit rien qu’à l’idée de ramasser les glands directement du producteur au consommateur, en voilà une idée qu’elle est moderne !
Vous savez comment c’est dans les contes :
on raccourcit, épargnés échelle et les outils
Vania troue le plafond et même que dans l’élan, il troue le toit ! Et que le chêne il a pousse poussé tant poussé qu’il disparaît dans les nuages.
“Mon Vania nous n’avons plus rien à manger, prends la besace, grimpe et ramène nous des glands tout frais”
Et Vania il grimpe grimpe
Et le voilà installé sur une branche car il est un peu fatigué. Du coup il regarde tout autour de lui. Et c’est là qu’il aperçoit assis là, à ses côtés un petit coq avec une crête qui brille comme l’or brille sous le soleil ! Et c’est pas tout, à côté du petit coq à la crête d’or se tient assis aussi sur la même branche un vieux petit moulin de bois.
Vous savez comment c’est dans les contes : on raccourcit,
Oubliés glands oubliée descente, Vania ramène besace pleine
Houlala Olga est mécontente.
“C’est quoi ce petit coq à la crête d’or, c’est quoi ce petit moulin, tu crois que je vais pouvoir les cuisiner ?”
A vrai dire Vieux Vieux Vania n’en sait trop rien, il hausse les épaules, “j’sais pas Olga, y a qu’à voir” et sur ces mots il tire sur le petit tiroir du petit moulin
Y a jamais eu plus belle surprise : il tombe sur la table, un truc fou. Des blinis, des pirojkis, des crêpes, des tapas, de la vodka et même du cidre de la vallée de la Seiche directement coulé dans de petites bolées à cercle rouge oui oui oui,
Même avec l’aide de Petit Coqcrêtedor, Vania et Olga n’arrivent pas à tout manger.
Mais ce qui reste vrai c’est que le lendemain petit tiroir tiré hop nouvelle belle surprise : tout réapparaît. Blinis, pirojkis, crêpes, cidre directement versé dans les bolées à liseré rouge, tapas, vodka vrai de vrai c’est bombance et bombance tous les jours. Pauvreté n’a plus de place dans la petite isba. C’est tout bonheur.
Mais le bonheur est fragile.
Un matin trois forts coups sont frappés à la porte. Ils résonnent par toute la petite isba. C’est un Barine, autant dire un noble personnage qui possède des esclaves. Il porte des bottes de cuir frappé d’or, un manteau bien coupé dans un lourd tissu aux revers bordé d’hermine. Impossible d’ignorer qu’il est un homme important.
Olga se courbe devant lui en signe de respect « Je vous apporte à boire tout de suite, asseyez-vous Maître » C’est ainsi qu’on appelle le Barine.
Olga s’éloigne.
Elle revient avec une carafe de lait frais et le Petit Moulin et elle tire le tiroir. Ah la la la sous les yeux du Barine arrivent blinis, pirojkis, crêpes, cidre de la Seiche directement versé dans les bolées à double cercles rouges, tapas, vodka … Le Barine écarquille ses yeux en découvrant le Petit moulin, il le veut
« Vieille Vieille Olga ton Moulin est un Moulin Magique vends-le moi ! »
Mais elle ne veut pas, mon moulin n’est pas à vendre
Vends-moi ton Moulin magique Vieille Vieille Olga sinon je vais te le prendre Et d’ailleurs, tu ne veux pas me le vendre, tant pis pour toi, le voilà mien (…….silence…….) et clac, il attrape le Petit Moulin et Vania et Olga n’ont plus que leurs yeux pour pleurer tout en regardant disparaître à l'horizon la troïka du barine.
C’est alors qu’ils entendent une petite voix. C’est la voix de P'titcoqcrêtedor
« Ne pleurez pas Tania et Vania je vais vous le ramener » Et de deux Vania et Olga regardent P’titcocrêtedor s'évanouir à son tour à l'horizon. Mais cette fois, Olga et Vania ne pleurent pas.
Vous savez comment c’est dans les contes : on raccourcit,
Epargnées routes, épargnés chemins.
P’titcocrêtedor cocoricote dans la cour de la datcha du Barine
Cocorico cocorico
Barine barine
Rends moi le Moulin Magique
Pour toute réponse le barine Sergueï hurle "PIOTR jette-moi ce coq dans le puits !"
Et vite fait bien fait Piotr obéit, plouf P’titcocrêtedor tombe dans le puits.
Que croyez-vous qu’il se soit passé ?
P’titcocrêtedor a ordonné
P’tibec, P’tibec bois-moi toute l’eau
A-t-il tout bu Ptitbec ou n’a-t-il pas tout bu ?
Oui, il a tout bu
P’titcocrêtedor s’est envolé sur la plus haute branche d’un micocoulier
Que croyez-vous qu’il ait fait, il a cocoricoté ou il n’a pas cocoricoté ?
Oui il a cocoricoté
Cocorico cocorico
barine barine
rends-moi le Moulin Magique
"Oh le maudit Coq" a dit le Barine et il a crié au cuisinier
« Gavriliiiiiiine jette-moi donc ce maudit coq dans le four brûlant ! »
Gavriline a attrapé Ptitcocrêtedor et hop il l’a mise dans le four, la bête
Et là que croyez vous qu’il ait fait P’titcocrêtedor ?
A-t-il cocorico té ou n’a-t-il pas cocoricoté ?
Ne répondez pas, moi seule le sait
Non il a juste dit
“P’tibec, verse l’eau que tu as bue, verse toute l’eau”
Et à cet instant précis, savez-vous ce qu’il a fait P’tibec ?
Oui, il reversé toute l’eau qu’il avait bue et le four s’est éteint ! Et dans le flot la porte s’est ouverte et il a volé jusque dans la grande salle de la datcha et il a cocoricoté
Cocorico cocorico
Barine barine
Rends moi le Moulin Magique
Et comme il y avait des invités dans la grande salle ils ont tous eu peur et ils se sont sauvés en courant bien vite. Le Barine aussi a eu peur et il a eu si peur qu’il a oublié le Petit Moulin.
Ptitcocrêtedor était là. Il a pris le Petit Moulin et il est retourné bien vite chez Vieux Vieux Vania et Vieille Vieille Olga.
Et alors ?
Alors :
blinis,
pirojkis,
crêpes,
cidre de la Seiche directement versé dans les bolées à cercle rouge,
tapas,
vodka,
et aux dernières nouvelles
mais vous n’êtes pas obligés de me croire
koulibiac de saumon couscous tajine et paella
scoop boules de neige à la rose, plumpudding vatrouchka et kouign aman !
si c’est pas vrai rien n’est faux. Le conte finit là.
Qui l’a dit ?
La p’tite sourit, pardi !
Version Lania d'après Contes Russe (Grund)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire