je m’en vais en voyage.
Bien qu’ils n’existent pas
je porte leurs bagages.
Je suis seul et ils sont deux.
Lorsque le train démarre
je vois sur leur visage
la satisfaction
de rester immobiles
quand tout fuit autour d’eux.
Comme ils sont face à face
chacun a ses raisons.
L’un dit : les choses viennent
et l’autre : elles s’en vont.
Quand le train les dépasse
est-ce que les maisons
subsistent ou s’effacent ?
moi je dis qu’après nous
ne reste rien du tout.
Voyez comme vous êtes !
lui répond le premier,
pour vous rien ne s’arrête
moi je vois l’horizon
de champs et de villages
longuement persister.
Nous sommes le passage
nous sommes la fumée ...
C’est ainsi qu’ils devisent
et la discussion
devient si difficile
qu’ils perdent la raison.
Alors le train s’arrête
avec le paysage
alors tout se confond.
- Jean TARDIEU, « Voyage avec Monsieur Monsieur », Le Fleuve caché,
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