lundi 31 octobre 2016

"Vent vent oh la la quel vent !" Randonnée contée sur Balconnier

mardi 30 juin 2009 -rectifiée ce jour 27 décembre 2016


Dans une cité, sur un balcon fleuri, dans une ville de province, une fillette joue avec son poupon. 
Le bras droit du poupon se détache. Il  tombe.
Pauvre poupon.
Mais heureux bras, Lebras Devenu.

Voilà que "Chic" se dit-il "à moi les voyages ! » et
il s'envole 
Mais Vent s’en mêle et hop là le mène-emmène, 
hop la la le mène-emmène-tourne-emporte  où ?
Tout là haut au-dessus de la tour des Horizons



Tour des Horizons à Rennes





« D’en haut tout est beau  oh comme c’est beau » C’est beau comme l’enfant qui tourne-danse bras levés et pieds pointés sur le rebord de la fontaine de l'esplanade Colombia.


















Mais Vent s'en mêle, hop là, 
mène-emmêle, tourne-emporte 
Lebras Devenu où ?
Tout là haut là-bas au-dessus du sommet 
de la montagne Himalaya



Photo appartenant à "Le Figaro" 



Nez au frais, joues rosies, Lebras devenu découvre le Gange, le plus long fleuve de l’Inde. Il naît dans les neiges éternelles, et il s’en va sautant bondissant grossissant de rocher en rocher puis filant, paisible à travers la vallée pour s'unir à l’Océan.






Mais Vent s'en mêle, hop là, 
mène-emmêle, tourne-mène-emporte 
Lebras Devenu et le dépose aux pieds de Miss Toureiffel 
sur l’esplanade du Champ de  Mars



Photo de J.L.





« Belle demoiselle, corset de fer d'or, 
joliment tête en l'air, offre-moi un baiser" dit Lebras Devenu. 
Miss Toureiffel rit, se penche à la Chagall, dépose 
un baiser de feu de fer sur la joue fraîche de Lebras Devenu 
mais se redresse en le déposant sur la plus haute de ses terrasses. 
Lebras Devenu découvre le Tout Toits de Paris.  
« Quelle belle ville, comme c’est beau ici ! » 









Mais Vent s'en mêle, hop là, 
s’en mène-emmêle, et tourne-mène-emporte 
par dessus l’Océan. Vent dépose Lebras Devenu 
dans le port de New York, sur la main de la statue de la Liberté



fr.freepik.com - Statue de la Liberté




"Bonjour, petit Français de Paris" 
dit la célèbre couronnée, 
"Chatouille-moi s'il te plaît 
il y a longtemps que je n'ai pas ri" 
Lebras Devenu, gamin de Paris 
offre bise bise et guili guili et les chatouilles 
enchantent la belle dame à la robe verte.










Déjà Vent s'en mêle, hop là, 
mène-emmêle, tourne-mène-emporte
Lebras Devenu sur le flambeau  de la statue de la liberté
Ho ho comme c'est haut ici 
"C'est vrai mon ami, c'est très haut" Dit la Belle Dame Verte  
"mais  d'ici vous découvrez New York
et ses gratte-ciels"







Déjà Vent s'en mêle, hop là, 
mène-mêle, tourne-mène-emporte
Lebras Devenu 
par-dessus l’île de Cuba, 
par-dessus la ville de Bogota, enfin il le dépose 
sur la dernière terrasse du Machu Pichu
"Ho ho, comme c'est haut ici" dit Lebras Devenu 
et il descend les escaliers pentus du Machu Pichu.



latinaish.com



« Bravo pour ton bel exploit » dit  Pachamama la déesse de la Terre .
Sa bouche rit et son rire va d’un roc à l’autre 
dans une valse d’échos qui ne s’éteignent jamais. 




Déjà Vent s'en mêle, hop la, 
mène-emmêle, tourne-mène-emporte 
et Lebras devenu s'envole et atterrit 
cette fois sur le bord des chutes du Niagara. 
Quel bruit,
 quelle pluie, 
quelle humidité, quels fols tourbillons.  




http://www.mackoo.com/canada/falls.htm






Lebras Devenu enfile imperméable et chapeau cirés jaunes. Il monte dans le minuscule bateau qui tourne-danse-remue-cahote sur la mousse blanche. Lebras Devenu caresse la brume qui se dépose sur ses paupières, front et joues. 






Déjà Vent s'en mêle, hop la, 
le mène-emmêle-emmène, le tourne-mène-emporte 
et Lebras Devenu s’envole. Où s'en va-t-il cette fois ?



Sur un balcon rennais une fillette se réveille. 
« Maman mon poupon a perdu un bras, il m’a emportée avec lui loin très loin dans le monde ! »

"Qu'est-ce que tu racontes, Fiyette, ton poupon est dans tes bras ! Tel qu'il est, il est tout entier : une tête deux bras deux jambes, comme toi et moi »
Fiyette ouvre les yeux, Fiyette baille à tout va. 
« Oh Maman si tu savais tout ce que j’ai vu, j'en suis fatiguée ! »

 « Qu’as-tu vu Fiyette, dis-moi ! » Maman sourit et l'enfant répond :




Du haut du ciel Maman je tai vu Toi
sur ton Balcon
Me crois-tu Maman ?
"Pour le balcon je sais que tu l’as vu Fiyette, tu es même dessus. Pour le reste pour moi tu as rêvé et comme je ne sais pas de quoi, tu vas me raconter ton rêve. toi seule sais, et pour moi qui ne sais pas, tu vas me raconter ? "
Et Fiyette raconte…. qu’elle a vu à Rennes
La haute tour des Horizons 
au Tibet
Les hauts sommets de l’Himalaya
à Paris
la Belle Miss Tour Eiffel
à New York
La statue de la Liberté
au Pérou
Les terrasses du Machu Pichu
aux USA 
du lac Erié
Les Niagara falls

les Niagara Falls ?
Oui Maman, on dit aussi les chutes du Niagara. J’ai vu tout ça.



Voilà, c'est fait. 
Et ri ri, la petite souris a tout pris. 

Ri ri, le conte finit ici.

samedi 29 octobre 2016

Conte du Rwanda : Kola-i Chauve-Souris cherche son camp

un conte du Rwanda

Chauve-Souris choisit son camp

Il était une fois, il n’était pas, une seule fois suffit

C’était il y a longtemps, loin d’ici, loin de là, 
…au temps où les animaux parlaient entre eux…. si bien et parfois si mal que les désaccords surgissaient.
Et comme parfois il n’y avait pas toujours de médiateurs... 
parfois la guerre arrivait.

Et justement un jour sans médiateur les animaux se déclarèrent la guerre. Les Oiseaux à plumes se tenaient d’un côté, les animaux à crocs se tenaient de l’autre côté.

Chauve-Souris s’est trouvée bien embêtée. Chauve Souris a des plumes mais Chauve Souris a aussi des dents. Du coup elle ne sait pas quel camp choisir ? Elle ne sait ps quel camp préférer ? Il y avait de quoi réfléchir. Chauve Souris réfléchissait comme elle sait faire, la tête à l’envers. Accrochée à une branche, tête en bas, elle évaluait la situation
« J’ai des ailes, c’est pratique, avec elles je me dégage des embarras comme je veux. Tous les oiseaux font ça. Je suis donc un oiseau.  Les oiseaux sont les plus forts et bien » et là Kola-i se parle à elle-même et elle se dit « Allez ma belle Kola-i, oublie tes dents et va rejoindre les Oiseaux ! » 
Et c’est ainsi que Chauve Souris a rejoint le camp des Oiseaux, celui de l’armée DZailes !



C’est Aigle qui était le chef des Armées DZailes… Chauve Souris l’a salué et pour le rassurer elle a dissimulé ses dents autant qu’elle pouvait ce qui lui donnait une drôle de façon de parler « Bonjour Aigle Chef des Armées DZailes, Je suis Koal-i Chauve Souris je veux m’enrôler dans votre troupe, prenez-moi vous pouvez compter sur moi, je viens me battre à vos côtés » Et elle le réconforte en ajoutant cette certitude  « j’ai de belles ailes et elles sont efficaces ! »

Elle a bien parlé, Aigle est sous l’influence de sa parole. Il enrôle Kola-I Chauve-Souris.
Aigle donne les ordres. La bataille s’engage. C’est une belle bataille.  Aigle a du galon. C’est un bon général. Ses ordres sont bien suivis. Et dans le combat il faut voir comme Koal-i Chauve Souris se démène. Et pourtant,  malgré tout cela et malgré les efforts de Chauve-Souris, c’est l’armée des Oiseaux l’Armée DZailes  qui prend la pâtée. La défaite est inattendue mais elle est bel et bien là !

L’Armée gagnante est celle des rivaux : l’armée des animaux qui ont des dents, l’armée appelée l’Armée D100Dents. Justement, des dents Kola-i en a. Elle décide aussitôt de trahir  l’armée DZailes. Mais que va-t-elle faire des siennes ? Façon « pies », elle les cache autant qu’elle peut et les serre au plus près de son corps. Quand elle rejoint l’armée d100Dents. Victorieuse elle se retrouve devant Lion son chef. 





Alors, sourire ravageur et toutes ses dents en avant, elle s’adresse au chef de l’Armée D100Dents
"Majesté, les volatiles m'avaient enrôlée de force dans leur armée, 
alors que je suis un mammifère comme vous !"
Lion ne se méfie pas, il succombe au sourire ravageur. Il enrôle Kola-i. La Traîtresse a obtenu ce qu’elle voulait. Elle livre aux côtés de l’armée de Lion un nouveau combat, contre l’armée DZailes. Elle se bat, elle se déchaîne, et elle chante son hymne préféré : « on va gagner, enfin,  je vais gagner, je vais gagner ! » Elle est persuadée qu’elle est cette fois dans la bonne armée, celle qui va gagner.

Persuadée mais à la fin du combat très déconcertée. Son armée a perdu. C’est l’armée des Oiseaux, l'armée DZailes qui a  a gagné.

Chauve-Souris est mauvaise-perdante, elle ne supporte pas de perdre. Elle ne recule devant rien. Elle retourne vers l'armée DZailes. Elle félicite Aigle, elle félicite ses savoirs-faire, elle flatte chacun. Aigle se marre sans rien dire. Quelle audace elle a cette traîtresse. Mais quand elle ose lui demander de la reprendre  tous se rebiffent contre elle.

Coups de becs et d’insultes lui tombent sur le dos « traîtresse, d’où viens-tu, tu te moques de nous, et crois-tu que, et que crois-tu ..." Leur décision est prise Tu ne fais plus partie de notre armée ! » Kola-i croûle sous les coups que les oiseaux lui distribuent. Elle tente autant qu’elle peut d’esquiver les coups. Enfin  quand elle réussit à s’échapper c'est pour rejoindre  l’armée D100Dents. Ils ne l'accueillent pas avec plaisir. A leur tour ils la renvoient, la chassent, l’expulsent définitivement et lui ordonnent de ne plus jamais venir frapper à leur porte !


C'est depuis ce jour-là que Chauve Souris craint de se montrer le jour. c'est depuis ce jour-là que cette renégate  a si peur, qu'elle ne sort plus.... que la nuit.



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Conte du Rwanda : Kola-i Chauve-Souris cherche son camp

un conte du Rwanda

Chauve-Souris choisit son camp

Il était une fois, il n’était pas, une seule fois suffit

C’était il y a longtemps, loin d’ici, loin de là, 
…au temps où les animaux parlaient entre eux…. si bien et parfois si mal que les désaccords surgissaient.
Et comme parfois il n’y avait pas toujours de médiateurs... 
parfois la guerre arrivait.

Et justement un jour sans médiateur les animaux se déclarèrent la guerre. Les Oiseaux à plumes se tenaient d’un côté, les animaux à crocs se tenaient de l’autre côté.

Chauve-Souris s’est trouvée bien embêtée. Chauve Souris a des plumes mais Chauve Souris a aussi des dents. Du coup elle ne sait pas quel camp choisir ? Elle ne sait ps quel camp préférer ? Il y avait de quoi réfléchir. Chauve Souris réfléchissait comme elle sait faire, la tête à l’envers. Accrochée à une branche, tête en bas, elle évaluait la situation
« J’ai des ailes, c’est pratique, avec elles je me dégage des embarras comme je veux. Tous les oiseaux font ça. Je suis donc un oiseau.  Les oiseaux sont les plus forts et bien » et là Kola-i se parle à elle-même et elle se dit « Allez ma belle Kola-i, oublie tes dents et va rejoindre les Oiseaux ! » 
Et c’est ainsi que Chauve Souris a rejoint le camp des Oiseaux, celui de l’armée DZailes !



C’est Aigle qui était le chef des Armées DZailes… Chauve Souris l’a salué et pour le rassurer elle a dissimulé ses dents autant qu’elle pouvait ce qui lui donnait une drôle de façon de parler « Bonjour Aigle Chef des Armées DZailes, Je suis Koal-i Chauve Souris je veux m’enrôler dans votre troupe, prenez-moi vous pouvez compter sur moi, je viens me battre à vos côtés » Et elle le réconforte en ajoutant cette certitude  « j’ai de belles ailes et elles sont efficaces ! »

Elle a bien parlé, Aigle est sous l’influence de sa parole. Il enrôle Kola-I Chauve-Souris.
Aigle donne les ordres. La bataille s’engage. C’est une belle bataille.  Aigle a du galon. C’est un bon général. Ses ordres sont bien suivis. Et dans le combat il faut voir comme Koal-i Chauve Souris se démène. Et pourtant,  malgré tout cela et malgré les efforts de Chauve-Souris, c’est l’armée des Oiseaux l’Armée DZailes  qui prend la pâtée. La défaite est inattendue mais elle est bel et bien là !

L’Armée gagnante est celle des rivaux : l’armée des animaux qui ont des dents, l’armée appelée l’Armée D100Dents. Justement, des dents Kola-i en a. Elle décide aussitôt de trahir  l’armée DZailes. Mais que va-t-elle faire des siennes ? Façon « pies », elle les cache autant qu’elle peut et les serre au plus près de son corps. Quand elle rejoint l’armée d100Dents. Victorieuse elle se retrouve devant Lion son chef. 





Alors, sourire ravageur et toutes ses dents en avant, elle s’adresse au chef de l’Armée D100Dents
"Majesté, les volatiles m'avaient enrôlée de force dans leur armée, 
alors que je suis un mammifère comme vous !"
Lion ne se méfie pas, il succombe au sourire ravageur. Il enrôle Kola-i. La Traîtresse a obtenu ce qu’elle voulait. Elle livre aux côtés de l’armée de Lion un nouveau combat, contre l’armée DZailes. Elle se bat, elle se déchaîne, et elle chante son hymne préféré : « on va gagner, on va gagner, je vais gagner, je vais gagner ! » Elle est persuadée qu’elle est cette fois dans la bonne armée, celle qui va gagner.

Persuadée mais déconcertée. Car c’est l’armée des Oiseaux, l'armée DZailes qui prend sa revanche : l’armée DZailes a gagné.

Chauve-Souris est mauvaise-perdante, elle ne supporte pas d’être perdante. Ne reculant devant rien elle se tourne vers l’armée des Oiseaux, l'armée DZailes, elle la  félicite, elle les félicite tous, elle les flatte, et même, elle ose leur demander de la reprendre !

C’est une grosse erreur ! Tous les oiseaux la reçoivent à coups de becs et d’insultes « mais d’où tu viens, de qui te moques-tu, penses tu que… que crois-tu, crois-tu que ! » Elle croûle sous les coups que les oiseaux lui distribuent. Elle tente autant qu’elle peut d’esquiver les coups et enfin réussit à s’échapper. Mais comme elle rejoint l’armée D100Dents, les  Animaux qui la renvoient, la chassent, l’expulsent définitivement. « Ne frappe plus jamais à la porte ! »

Et depuis ce jour-là Chauve Souris a peur de se montrer. Elle a si peur, que cette renégate ne sort plus que la nuit.

(je me permets de rappeler à propos du Rwanda qu'un film est programmé le dimanche 30 octobre à 18 h au CINE TNB à Rennes. Son titre #lhommequireparelesfemmes le docteur Mukwege qui a reçu le prix Sakharov en 2014.

Sans aucun lien, mais capté alors que j'écoute aussi la TV, "Dieu est en nous .... Notre potentiel c'est notre patrie" Propos d'une bergère mexicaine, Nanci... "la montagne et tous ses espaces sont pour moi imprégnés de dieu" 


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jeudi 27 octobre 2016

Un vieux conte des bords de Rance en Ille et Vilaine : "Les deux noces"

En ce temps-là, pas encore de moteur à explosion, 
on se déplace à pied, en carriole, ou en carrosse.
En ce temps-là, pas de dame électricité,  
on s'éclaire à la bougie, on mange les légumes 
de son jardin et le pain de son four à pain.
Et cela du côté du pays d'Ailleurs ou de celui de Rance, 
non loin de Dinard et tout près de l'îlot Chalibert. . 


Chalibert était le nom d'une fée. Une fée qui comme toutes les fées possédait des pouvoirs. Parmi l'un de ceux-ci elle avait celui  de faire mettre à certains... cap sur l'autre monde, et si cette fantaisie la prenait c'était pour cent ans, au moins. 
Ah la charmante fée Chalibert.

Un jour, cette fantaisie lui prit.
Yé Kric 
Yé Krac 
l’histoire vient. 
L'histoire est là.   

Un jour, 
Un de ces jours, aurait dit le conteur, "pris entre deux nuits et disparus depuis belle lurette dans la besace du temps", deux cortèges de noces se sont présentés à cet endroit de la rive de la Rance qu’on appellait la cale de Jouvence et qu'on appelle aujourd'hui la cale de   Jouvente. Les deux cortèges espéraient la présence d'un passeur ; le passeur les mènerait de l'autre côté de la Rance. Un prêtre les accueillerait sur l'ilôt d'Aleth et l'un après l'autre, il procèderait aux deux mariages.

A l'arrivée sur le ponton, les deux cortèges, ont une belle surprise. Le passeur n'est pas au rendez-vous. Il faut l'attendre. Tous attendent. Mais à l'intérieur des deux cortèges, il y a des impatients. Bientôt, comme le temps passe, il y a des inquiets.  Les conversations vont bon train sans passer d'un cortège à l'autre. De cortège en cortège pas question de se mêler à l'autre cortège. 
  
L'une des noces est celle du Maître du Château de Pleurtuit. Le Marquis de Pleurtuit. 




La mariée est sa fille, la jolie Rozenn. Dans le cortège, il y a tout une troupe de gentilshommes, de dames, de pages et de valets, tous richement accoutrés. Tous d'un brillant apparat. Quand ils reviendront ils danseront dans les allées du jardin sans oublier la terrasse.
La seconde noce est toute différente. Elle est de basse roture côté mariée comme côté marié. Aucune noblesse. Peu d'argent. Des manants et manantes, vêtus de droguets, le créateur des craquelins entre autres, qui les vendait à l'époque de Noël au châtelain et était ainsi accueilli aux cuisines.

Soudain, il y a un mouvement de foule. Des deux côtés, on se hausse sur la pointe des pieds, on s'appuie sur les épaules du voisin ou de la voisine. Les regards montent vers le ciel.  Il s'est obscurci, de grisé, il passe au noir violet, certains évoquent une tempête. Ils disent qu'elle  menace ! Mais ils font erreur. Ce n'est pas la tempête qui vient. C'est une barque. Qui vogue de nuage en nuage. Bientôt elle affleure et s'arrête au bas de la cale de Jouvente


. Et la seule voyageuse est une pauvresse, une mendiante.  Chacun s'interroge « D’où sort cette femme ? Qui est-elle ? »  Son visage pourrait être friable tant les rides s'y croisent. Ses vêtements ne sont pas vêtements, ils  sont  loques traînant sur le sol tant la vieille est courbée en deux. Tous les yeux suivent silencieux la vieille qui monte sur le ponton. Que veut-elle ? Elle tend une main aussi plate que possible.  Sa voix chevrotante répète  L'aumône s'il vous plaît, l'aumône Messieurs, Mesdames, braves gens !" Sa voix cassée aurait fait donner trois sous, par le plus mendiant des mendiants des Mille et une Nuit, le riche commerçant  Abhou Khacem. cet Abhou  si avare qu’il s’habillait toujours de guenilles jusqu'aux babouches milles fois trouées reprisées.
  
Dans le cortège des manants, la fiancée paysanne fait immédiatement un signe à son promis. Il n'a pas besoin d'explication, il a compris.  Il plonge sa main dans son escarcelle et retire quelques liards. Sans l'ombre d'une hésitation il les tend à la mendiante.  « Que ces quelques liards vous portent chance Madame ! » dit-il. La mendiante le remercie d'un grand sourire et se dirige vers la seconde noce.

Le futur marié gentilhomme est prêt à faire de même, sinon mieux. Il tire sa bourse d’or et s'apprête à l'ouvrir. Mais alors sa jeune fiancée lui donne un  coup de coude si brutal et si inattendu qu'il ne peut réagir :  il lâche la bourse de cuir, elle tombe à l’eau. Aucun hasard dans ce geste. La fiancée du chateau rit sans retenue. Elle s’amuse beaucoup.  Elle rit encore quand  le passeur attendu se présente. Et que la mendiante n'est plu.

Tout le monde se précipite. Mais le passeur arrête chacun d'une main levée. Mais pas que : il retient surtout les deux couples. Il en met un sur sa droite, l'autre sur sa gauche et il il sépare chacun de sa chacune. Finalement dans un grand silence, tout le monde s'interroge : pourquoi ? Il embarque la future mariée du Château de Pleurtuit, et le futur marié du cortège roturier. Pourquoi ? Monteront-ils tous ? Non. Ils sont les seuls. Le passeur n'invite personne d’autre.

Il manœuvre sa barque. Sous les yeux de tous, la barque cingle vers le large. C’est à n’y rien comprendre. Chacun est médusé. Certains disent en montrant le ciel 
« C'est à cause de la mendiante, de la pauvresse, regardez, elle est dans le ciel ! dans les nuages ! » 
Certains disent qu’en effet, les nuages lui ressemblent, d’autres disent
« Bêtise, balivernes, les nuages ne sont que des nuages ! » 
La pauvresse n'est pas dans les nuages. Elle se tient là, tout près, assise sur un muret. Sa paume droite est ouverte et chacun peut y voir les quelques liards offerts par le jeune roturier.  Mais personne ne remarque quoi que ce soit : face à elle ce ne sont pas des visages mais les dos de tous, qui regardent s'éloigner la barque du passeur qui n'est plus que coquille de noix. 

Quand l'horizon avale la barque, ceux des deux cortèges se retournent. Ils sont médusés. La mendiante est là ! Pourquoi ? ils sont davantage encore médusés quand ils comprennent qu'elle s'adresse à eux. 
  
« Laissez-moi vous dire qui je suis. On m’appelle la fée Chalibert. Je rendrai à chacun la monnaie de sa pièce ou la pièce de sa monnaie" dit-elle. "Quand je paierai mon dû, personne ne manquera à l'appel. Il vous faudra seulement attendre le temps qu’il me faudra pour le faire. 100 ans. Et dans 100 ans vous reviendrez tous à ce même endroit. Je serai là !"

Et sur ces mots la fée Chalibert disparaît.


100 ans ! Personne n'y croyait.
En ces temps anciens, il n'était pas facile d'atteindre cent ans. Mais  la Fée Chalibert les garda tous en vie grâce à ses pouvoirs. La fiancée du manant, le fiancée de la jeune fille noble et tous ceux qui se trouvaient dans les deux cortèges : certains conteurs disent  même que "les chiens des seigneurs et les poux des manants vécurent cent ans à leur tour". Ce qui fut vrai, c'est que personne n’échappa aux sévices du temps.

Au bout des cent ans le même jour,  les deux cortèges quittèrent l'un le château de Pleurtuit, l'autre quelques maisons du même village et tous se dirigèrent vers le ponton de Jouvente. 
Sans s’être consultés. 
Sans savoir pourquoi. L’instinct ? 
Plutôt la fée Chalibert. Les deux cortèges étaient étranges. Nombreux étaient ceux qui avançaient sur trois jambes, dont l'une offrait un écho de fer inégal. Chacun y allait de sa musique. Les poitrines toussaient, les bouches crachaient, les jambes titubaient ou boîtaient ; certaines têtes ne pouvaient que regarder le sol, d’autres corps tremblaient de la tête aux pieds. Certaines voix étaient réduites à un filet inaudible, certaines bouches sifflaient plus qu’elles ne parlaient, d'autre bavaient en découvrant des gencives dénudées. Comme bébés faisant leurs dents mais eux ne les faisant pas. C'était un pitoyable et dérisoire spectacle.
  
Ils se placèrent tous, les uns à côté des autres et quand le dernier s'installa, une barque apparut sur l'estuaire de la Rance.   Elle avançait, sans voile, sans rame, elle avançait doucement vers les vieillards chenus. Chacun reconnut sans peine, la demoiselle fiancée, fraîche comme une rose cueillie au petit matin, et à ses côtés, le jeune homme fiancé du cortège roturier. Tous deux portaient leurs habits de noces dans le même état que le jour de la noce. La robe blanche n'avait pas jauni, le costume noir n'était pas flétri.  Leurs silhouettes offraient l'image de la plus parfaite jeunesse. 
Leurs visages ne portaient aucune trace du Temps. 
Un brouhaha monta du ponton. Les vieillards s’étonnaient.
Les jeunes gens de la barque s’étonnaient aussi : voir autant de centenaires à la fois leur semblait inouï. La barque manoeuvrait pour se rapprocher du ponton. Les deux jeunes gens mirent pied à terre. La fée Chalibert apparut.

« Bonsoir » dit-elle «  Je viens vous rendre mon dû, je vous avais prévenu, aujourd'hui il est temps"
Elle fait un geste en direction du vieux gentilhomme. Le fiancé d’antan du château de Pleurtuit.  Elle lui montre sa jeune  et belle fiancée et elle déclare 
«La reconnaissez-vous ? Je suis venu vous la rendre, elle est à vous !"

Sitôt reconnue sa fiancé, les yeux du vieillard trahissent sa convoitise.  Il est tout content. Cela saute aux yeux de tous.
Mais la jeune et jolie fiancée n’est pas d'accord. Elle dit qu'elle ne le connaît pas, elle dit qu'elle ne le veut pas. Et sur le ponton elle tremble d'effroi quand il tremble de déception. 


Mais l’histoire n'est pas finie. 
La fée Chalibert se tourne vers une vieille paysanne tremblotante et l'interpelle d'un lumineux et rieur 
 « Demoiselle !  je suis venue vous rendre votre futur mari ; il est à vous» 
La pauvre vieille est terriblement émue : elle tremble encore plus en reconnaissant son bel amour, le petit gars de Pleurtuit. Elle sourit. Elle en devient presque ravissante. Comme elle s'avance vers lui, tout sourire, et bras ouverts, la fée Chalibert  fait un brusque mouvement et bascule la vieille femme dans les eaux. Elle coule dans la Rance. Sans aucune hésitation le beau fiancé plonge dans la rivière et retire des eaux froides sa promise d'hier. 

L'eau de la Rance aurait-elle des pouvoirs ? Le jeune homme pauvre croyait ramener sur le ponton sa vieille à la bouche édentée. Il ramène une belle, la belle de ses vingt ans, plus belle que jamais. 

La fée Chalibert leur sourit.  
"Chers enfants, le manoir de Pleurtuit vous appartient. Désormais vous en êtes les maîtres !"  
Ils veulent la remercier. Elle refuse. 
  « Ne me remerciez pas, vivez, tout simplement." 

L'un prend la main de l'autre et tous deux remontent le chemin en direction du château de Pleurtuit. Sur le ponton, la fée Chalibert fait en sorte que les vieillards, de l'un ou de l'autre cortège, disparaissent. Puis elle se retire à son tour. Et ce conte finit là. 




C’est grâce aux conteurs qui passent  et transmettent ce conte que chacun apprend qu’il faut traverser la Rance le cœur sincère et bienveillant. Sinon on passe dans l’autre monde pour cent ans. J'ai trouvé ce conte lors d'une recherche aux archives rennaises. Je l'ai écrit à ma façon. Sur le souvenir qui me restait.



Ce jour 6 octobre 2015, (un an déjà) j'ai le coeur à l'envers. Tristesse. 

 A disparu Albert Poulain, 



l'écouté, la preuve
conteur gallo émérite et autre encore
Tristesse.  (4 photos, dont certaines Ouest-France)